Faut-il dire aux enfants que leurs parents sont convertis ?

Chalom,

Bien que, dans la pratique de tous les jours, il n'y a pas de différences entre vos enfants et des enfants nés de deux parents juifs de naissance, il n'en reste pas moins que la conversion de leur père leur confère un statut spécifique [cf. Choul'han 'Aroukh, 'Hochen Michpat 277, 9 en ce qui concerne les lois de l'héritage lorsque le père est converti ; et Even Ha'ézer 169, 2 en ce qui concerne l'inaptitude à juger un cas de 'Halitsa].

Par conséquent, il convient de les informer de l'origine de leur père, afin qu'ils aient également conscience de leur propre statut.

Mais au-delà de cet aspect "technique", je voudrais bien insister sur le fait qu'il n'y a aucune honte à descendre d'un converti (ou à être soi-même converti), au contraire ! C'est un grand mérite de s'être rapproché de la Torah en choisissant pour cela de recommencer une nouvelle vie avec des nouvelles règles, tout cela pour se rapprocher d'Hachem et du peuple d'Israël.

Lorsque nos maîtres nous enseignent qu'il est interdit de rappeler à un converti son passé, cela concerne un rappel péjoratif : « S’il est converti et qu’il vient étudier la Torah, ne lui dis pas : la bouche qui a consommé de la nourriture non-Cachère voudrait étudier la Torah qui a été prononcée de la bouche de D.ieu ! » [Baba Métsia 58b]. Cependant, il n'y a aucun problème à mentionner que la personne est convertie si cela se fait dans un strict cadre informatif, et a fortiori lorsqu'il s'agit de faire l'éloge de son parcours.

Voici ce qu'écrit le Rav Moché Klein à ce propos [Michnate Haguèr, Hilkhot Guérim, 14, 12, note 28, pp.197-198] :« Il n’y a pas d’interdit de rappeler au converti qu’il est né dans un autre peuple, sauf si on lui dit : Souviens-toi de tes actes passés [quand tu n’étais pas juif] (…). Ainsi nous trouvons dans les paroles des Sages [du Talmud] qu’ils appelaient Ounkelos « le converti » et Yéhouda « fils de convertis » [cf. Chabbath 33a]. De même chez les Richonim, nous trouvons Abraham le converti qui faisait partie des Tossafistes [cf. Tossefot Kidouchine 70b] et ‘Ovadia « le converti » à qui le Rambam adresse une missive [Techouva n°293]. Or, il est clair que dans ces appellations, il n’y a aucun mépris. »

Ainsi, il ne faut pas hésiter à expliquer à vos enfants que leur père est converti, mais plus encore, il faut bien insister sur le mérite exceptionnel que cela représente. [Cf. également à ce propos ce que j'écris dans mon ouvrage Une identité juive en devenir, la conversion au judaïsme, éditions Lichma, pp.181-185 et 191-192.]

A votre disposition pour plus de précisions.

Kol Touv.

A propos du Rav

De formation universitaire (titulaire d’un doctorat en Droit), Rav Yona GHERTMAN s’est tourné vers des études de Kodech, à la Yechiva, puis au Collel de Nice (CEJ), où il étudie encore aujourd’hui. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le judaïsme, dans lesquels il puise parmi les sources traditionnelles, qu’il présente d’une manière structurée et pédagogique au public francophone. 

Aujourd’hui marié et père de quatre enfants, il partage son temps entre l’étude, l’enseignement de la Torah, et le rabbinat, où il s’occupe notamment des conversions au judaïsme. 

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